On ne nous a accordé qu'un rêve et un baiser de regards ( Ⅱ )
Il crut au temps et lui confia son espoir en agonie. Il le lui prit et en fit une promesse qu'il ne tiendrait plus. Le temps le tenait dans ses bras, puis, ce jour-là, il glissait et se brisait, vidé même de ses bribes, et livré à la merci des illusions.
Il doutait de ce jour, et il est arrivé. Nadia ne sera plus avec lui dans la bibliothèque. Il ne pourra plus ressentir ce parfum qu'il était tant curieux de découvrir. Parce qu'il n'a jamais osé lui demander le nom. Ces yeux qui semblaient le brûler et qu'il ne pouvait regarder aussi longtemps. Cette sensation étrange d'une joie soudaine qu'il se faisait quand ils se rencontraient. Rien de tout cela ne sera plus possible. Nadia est désormais à un homme. Et elle ne sera jamais à lui. Il rentra et se jeta sur son lit. Il ressentit qu'une brume couvrait ses yeux. Il les pinça avec ses doigts. Des larmes ? Il trouvait cela ridicule et absurde. C'était inacceptable. Il se pressa dans la cuisine et se lava le visage. Il ferma les yeux et les baigna dans ses paumes remplies d'eau sous le robinet. Comme s'il voulait les punir par noyade pour ne pas avoir pu empêcher les larmes. Qu’est-ce qui les lie encore ? Plutôt un vide qui s'impose. Ce silence effroyable que Nadia lui donnait. Depuis l'annonce. Ce qui les lie encore… Surtout les regards. Ceux-ci s'entrelaçaient puis se rejetaient. Ils semblaient s'être perdus dans un univers hostile. Piégés par les silhouettes des instants fantômes. Il dira plus tard : « Nadia est partie, mais son regard est resté. »
Nadia regardait le siège vide qu'il avait laissé. Elle l'avait vu venir vers eux pour les féliciter puis il sortait. Et il n'était plus revenu. Elle avait su que ce jour leur était destiné. Ce moment où les illusions finissent par être perçues. Quand celles-ci se rebellent, nous prennent au collet, et nous étouffent. A-t-elle aimé ? C'est ça, l'amour ? Parler avec des rêves et répondre par les regards. Oser dire à l'autre qu'on ressent, pour lui, quelque chose qu'on ne saurait comprendre. Voilà le malheur de l'amour. Nous doutons de ce qu'il est, de nous et de l'autre. L'amour meurt, il est liberté, car il nous assiège dans le doute.
La cérémonie de mariage avait cessé de la faire sourire. Son époux devinait sa mine. Il eut envie de lui demander ce qu'elle avait, mais pensa que toutes les femmes paraissent tristes le jour de leur mariage. Nadia aurait parié que son amoureux ne serait pas là. Il ne voudra pas venir, pensa-t-elle. Sa surprise fut une joie en le voyant. Ensuite, c'était un regret. Un supplice éprouvé par des regards pour avoir fait évader des souvenirs. Elle ressentait une culpabilité. Celle que connaissent les meurtriers après avoir achevé leur victime. Elle avait reconnu son crime, et dira un jour à sa postérité : « J'ai tué. Ce n'était pas un homme, mais son cœur. Je ne sais pas si ce fut un choix. »







Machallah je trouve le texte superbe
RépondreSupprimerC’est fantastique cet texte
RépondreSupprimerÉmouvant ❤️🩹
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